Sécurité au travail : comment faire évoluer durablement les comportements dans l’entreprise ?

Former vos collaborateurs à la sécurité, c’est essentiel. Mais comment choisir un mode de formation vraiment efficace ? Nous avons demandé à Laurent Jarnoux, CEO de MINDLY Safe Working, qui propose des formations pour changer les comportements face aux risques d’accidents en entreprise, de nous dresser un tour d’horizon des approches les plus efficaces. Objectif : ancrer durablement les bons réflexes et changer les comportements face aux risques professionnels.
Comment les entreprises abordent-elles aujourd’hui la formation à la sécurité ?
Dans la grande majorité des entreprises, la sécurité repose avant tout sur des actions de sensibilisation. On donne et on rappelle aux collaborateurs et aux collaboratrices des règles métiers qui leur permettent de se sécuriser : procédures, consignes, EPI (Équipements de Protection Individuels), modes opératoires, etc. C’est bien sûr indispensable.
Mais cela ne suffit pas. Et sur le terrain, on se rend compte que ces règles ne sont pas toujours respectées. Parfois même, elles ne sont pas bien comprises. En France, selon les derniers chiffres de l’Assurance maladie, deux personnes meurent chaque jour à la suite d’un accident du travail.
Deux secteurs vont plus loin que la sensibilisation et se démarquent lorsqu’on parle de sécurité au travail :
- Le nucléaire, avec une approche très contrôlée où les équipes s’observent mutuellement en permanence. C’est efficace, mais difficilement transposable dans les autres secteurs pour des raisons évidentes de ressources importantes à mettre en œuvre, et de coûts associés.
- L’aviation civile, qui a su introduire, il y a plus de vingt-cinq ans maintenant, dans la formation des pilotes, une dimension comportementale – C’est ce modèle qui nous a inspirés chez MINDLY pour construire nos formations.
Quels sont les nouveaux modes de formation à la sécurité, et que pensez-vous de leur efficacité ?
Les entreprises disposent aujourd’hui d’un large éventail de formats pour former leurs équipes :
- La réalité virtuelle permet de recréer des environnements de travail pour confronter les collaborateurs et les collaboratrices à des scénarios à risque sans danger réel.
- Les serious games visent à renforcer la coopération et la prise de décision par le jeu.
- Les escape games renforcent la cohésion d’équipe et testent les capacités de communication et d’organisation des collaborateurs et collaboratrices.
- Les interventions théâtrales suscitent la réflexion sur les comportements professionnels.
Cette liste n’est pas exhaustive. De mon point de vue, toutes ces approches sont intéressantes mais, en matière de sécurité, elles ne permettent pas de modifier les comportements face aux risques. Cela pour une raison très simple : on reste avec elles sur une approche de sensibilisation. Si l’on veut faire évoluer les comportements, il faut les inclure dans une démarche profonde, centrée sur l’apprentissage et les pratiques comportementales.
Vous évoquez l’apprentissage comportemental : que nous apprennent les neurosciences sur la sécurité au travail ?
Les neurosciences nous disent que face à un danger, notre cerveau commande et peut nous piéger s’il est perturbé par la fatigue, le stress, une surcharge d’informations, une distraction, etc.
Notre cerveau peut mal interpréter une situation. Il peut mal percevoir un risque. Il peut nous tromper, malgré nous.
Pour limiter les erreurs, il faut donc entraîner notre cerveau à adopter les bons réflexes. Au risque de me répéter, cela passe par l’apprentissage et les pratiques comportementales.
Comment cela se traduit-il concrètement sur le terrain ?
Je peux vous parler des techniques que nous utilisons, inspirées de l’aviation civile. Voici trois exemples :
- Le « cockpit stérile » : Il s’agit d’interdire toute interruption et toute distraction pendant une tâche critique. Cela permet au cerveau de se concentrer pleinement. Certaines entreprises l’appliquent désormais lors des briefings du matin : plus de téléphones, plus d’échanges superflus.
- La communication sécurisée : c’est le fait de faire répéter une information lorsqu’on ne l’a pas bien comprise. Souvent, en entreprise, on n’ose pas demander à quelqu’un de répéter, par crainte de paraître incompétent. Pourtant, c’est redoutablement efficace.
- Le TEM (Threat and Error Management) : cela consiste à identifier, avant de se lancer sur son poste de travail, toutes les menaces du jour qui pèsent sur nous : conditions météo, personnel absent, fatigue importante, présence d’intérimaires, etc. Ignorer ces circonstances particulières, c’est ne pas prendre conscience à 100% de la situation à risque à laquelle on est exposé.
Lorsqu’on utilise ce type de techniques, basées sur les neurosciences, on modifie durablement les comportements face aux risques. C’est la clé de voute de la sécurité. C’est ce qui fait que l’on tend vers le zéro accident. Les managers modifient leur posture. Les collaborateurs s’approprient les réflexes, se concentrent mieux, font répéter. Des risques sont évités, simplement parce qu’on a changé de grille de lecture.
MINDLY Safe Working Fondée en 2022 à Montpellier, Mindly Safe Working révolutionne la prévention des accidents professionnels en s’inspirant des méthodes comportementales de l’aviation civile. Partant du constat que 80 % des accidents du travail sont dus à des erreurs humaines, l’entreprise propose des formations innovantes qui poussent les collaborateurs à devenir de véritables acteurs de leur sécurité. |