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Y a-t-il une place pour les émotions du dirigeant au sein de l’entreprise ?

Le cahier du dirigeant | 4 décembre 2020
Y a-t-il une place pour les émotions du dirigeant au sein de l’entreprise ?

Reléguées au second plan dès que l’on passe la porte de l’entreprise, les émotions semblent ne pas avoir de place dans un contexte professionnel, qui plus est quand on est dirigeant. Frédérique Jeske, dirigeante, coach et auteure du livre « Le Guide du dirigeant responsable : Réinventez votre entreprise pour la faire grandir ! », éclaire Mieux Le Mag sur les raisons de cette retenue et sur l’intérêt à laisser enfin une place aux émotions lorsque l’on dirige une entreprise.

Quelle place est accordée aux émotions au sein de l’entreprise ?

Les émotions gouvernent le monde mais elles n’ont pas encore trouvé leur place en entreprise, et surtout chez les dirigeants. La situation évolue depuis quelques années, car les dirigeants sont contraints de s’adapter à un environnement de plus en plus complexe et à une société de plus en plus émotionnelle. Les jeunes notamment, viennent à l’entrepreneuriat et à l’entreprise en tant que personnes. Ils ont moins peur que par le passé de montrer leur vulnérabilité et leur authenticité. Mais les émotions sont encore trop souvent mises à la porte de l’entreprise. C’est un sujet tabou et la règle consiste généralement à les ignorer, à les considérer comme non productives. On les voit comme des éléments perturbateurs du bon fonctionnement de l’entreprise. Pourtant, nos états d’âme et nos émotions ne s’arrêtent pas à la porte de notre bureau, et l’entreprise est avant tout une aventure humaine ! Surtout dans le climat d’incertitude actuel qui remet en question l’organisation traditionnelle de l’entreprise, le rapport au travail et le leadership.

Pourquoi veut-on autant les contrôler, voire les laisser à la porte de l’entreprise ?

Même s’il est de plus en plus question de savoir-être en entreprise, il est encore rare que la culture interne autorise les dirigeants, et même les salariés, à exprimer librement leurs émotions. Depuis l’enfance, on nous apprend à les éviter, surtout les émotions négatives comme la colère. Là où la maîtrise de soi est considérée comme un atout, l’expression des émotions reste encore souvent un signe de faiblesse. Elles ont très longtemps été considérées comme un facteur qui trouble la capacité de jugement et peut affecter les prises de décision. On est souvent confronté à l’idéologie du dirigeant « super-héros » qui ne peut exprimer aucune faiblesse, physique ou mentale, et qui reste debout contre vents et marées. Cette représentation rend difficile le fait de baisser le masque et d’exprimer difficultés, doutes et émotions. Si le dirigeant laisse transparaître ses émotions, il peut avoir le sentiment de se mettre à nu et d’ouvrir la porte à d’éventuels débordements d’émotions dans son entreprise. Il peut lui sembler, de prime abord, plus simple de porter un masque, voire sa cape de super-héros.

Quelle part d’émotionnel un dirigeant doit-il mettre dans ses prises de décision et sa façon de manager ?

La passion, la joie et le mouvement émergent des émotions ! Or, les dirigeants ont besoin de tout ça pour franchir les obstacles auxquels ils sont confrontés. Bien entendu, les émotions ne peuvent pas passer de problème à solution miracle en un claquement de doigts. C’est l’équilibre qui importe. C’est en mettant les émotions au service de notre pensée que nous pouvons en tirer bénéfice. Il ne s’agit pas de contrôler, maîtriser ou gérer les émotions mais de les accueillir, les écouter, les vivre pour agir en adéquation avec ses valeurs personnelles profondes. L’émotion est une « mise en action », et en mettre une part dans ses prises de décision et dans son management, de manière consciente et intelligente, permet de prendre de meilleures décisions, surtout dans un contexte qui contraint à des prises de décision rapides, qui rendent difficile le recours à l’intelligence rationnelle seule.

Comment gérer ses émotions en cas de crise ou de décisions difficiles à prendre (licenciements, fermeture d’un site, décisions salariales…) ?

Pour faire de ses émotions un atout, il faut d’abord accepter leur existence, ne plus les refouler et en retirer toutes les informations utiles. Si vous renforcez votre capacité à reconnaître et identifier vos émotions, vous renforcerez aussi votre capacité à anticiper vos réactions et mieux gérer au quotidien. Il faut ensuite apprendre à les exprimer de manière adaptée à l’environnement et au contexte. Enfin, il est impératif de travailler sur l’intensité, la durée et les composantes de l’émotion pour adapter ses réactions à son environnement. L’idée est d’exprimer ses émotions en conscience, en maîtrisant ses gestes, ses paroles et sa posture. Tout cela permet de garder de l’objectivité, de la vigilance et de l’humanité dans les situations les plus difficiles ! La relation à l’autre est aussi un volet majeur de l’intelligence émotionnelle, qui permet de développer empathie et compréhension de l’autre, ce qui est essentiel pour un dirigeant qui doit communiquer dans des contextes difficiles.

Quelle est la bonne manière de réagir face aux émotions des équipes ?

Une des missions majeures du leader consiste à créer l’inclusion dans son équipe, pour que tous se sentent parties prenantes, engagés, reconnus. C’est ce qui permet de construire l’intelligence collective nécessaire à la transformation et à la croissance de l’entreprise. L’intelligence émotionnelle du dirigeant est une clé pour créer cette base de sécurité qui autorisera chaque collaborateur à construire, à oser pour son entreprise. Il ne s’agit pas de manager « à l’émotion », mais de « manager l’émotion », et il est intéressant de penser à la « rentabilité » de l’intelligence émotionnelle. Son absence peut être source de souffrances pour les salariés, jusqu’à mettre en question la pérennité même de l’entreprise. Les émotions sont contagieuses, et les salariés sont immédiatement affectés par la résonance ou la dissonance exprimée par leur dirigeant. La détérioration du moral des salariés et de l’ambiance de travail se joue chaque jour. Si des facteurs émotionnels négatifs se combinent avec des jeux de pouvoir de la part de certains managers ou dirigeants, les impacts sur la productivité et la performance de l’entreprise ne tarderont pas à se multiplier : baisse de productivité, absentéisme et turn-over, impact sur la marque employeur et l’image de l’entreprise, augmentation du stress et des risques psychosociaux…

Quelles sont les conséquences d’une « mauvaise gestion » des émotions au sein d’une entreprise ?

Nous pouvons être emportés par les émotions sans avoir le temps de les comprendre pleinement. Le coup de tête de Zidane lors de la coupe du monde de football en 2006 ou le « Casse-toi pauv’con ! » de Nicolas Sarkozy au Salon de l’agriculture de 2008 en sont de belles illustrations ! Si l’on n’est pas conscient que nos actions, nos gestes, nos paroles, nos décisions sont fortement influencées par nos émotions, ces dernières vont interférer dans le quotidien et interdire une saine gestion de l’entreprise. Il faut réhabiliter les émotions dans l’entreprise et leur redonner une juste place, pour permettre à chacun de les exprimer et de les transformer en énergie positive, plutôt que d’attendre qu’elles explosent de manière négative. La perte de productivité liée à une mauvaise gestion des émotions est estimée à 30 % : du temps perdu à gérer des conflits, des rumeurs, des situations de stress ou de souffrance.

Au contraire, quels sont les points positifs pour un dirigeant à lever le tabou sur ses émotions ?

Quand on est dirigeant, s’autoriser à travailler sur ses émotions, c’est autoriser les émotions dans l’entreprise. Plus les innovations technologiques vont prendre de la place, plus l’entreprise pourra se différencier par sa capacité à mettre l’émotionnel au centre de sa vision et de ses valeurs. L’intelligence émotionnelle du leader est ainsi l’un des enjeux majeurs de la transformation culturelle de l’entreprise. Elle est devenue LA compétence clé du leadership. Le leadership a en fait peu à voir avec les notions de hiérarchie, de contrôle ou de pouvoir. Il concerne d’abord le fait de montrer la voie et d’influencer les autres, par ses actes et par ses mots. Aussi, l’objectif majeur du leader est de faire évoluer la manière d’exercer le pouvoir pour passer du « pouvoir pour soi » au « pouvoir au service des autres ». Il doit proposer le sens, créer la confiance, accompagner les individus, initier et guider l’intelligence collective. Empathie, sincérité, capacité à observer et écouter, intelligence émotionnelle sont désormais les compétences du leader du nouveau monde.

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