L’avenir, c’est les autres ! La compétitivité a changé notre monde, le partenaire est devenu un concurrent. C. Otto Scharmer démontre, avec beaucoup d’optimisme, que cette voie est sans issue. Se retrouver et bâtir ensemble, telle est sa conviction. Adaptable à tous types d’organisations, sa méthode est le fruit de nombreuses années de travail associant des enseignants chercheurs et des praticiens. Plongeons-nous dans cette théorie Ô combien enrichissante et pertinente, la « théorie U ».

L’immanquable changement

Otto Scharmer part du constat que l’avenir sera inévitablement très différent du passé. Simplement parce que les tendances lourdes, qui ont modelé le développement industriel mondial aujourd'hui, conduisent à une impasse. De ce fait, le type d’apprentissage classique qui consiste à tirer les leçons du passé ne suffit plus. Cette nécessité de changement est en nous. Il faut savoir l’actionner pour qu’une dynamique individuelle et collective, essentielle à la construction du monde de demain, se mette en place.

Faire table rase du passé

C. Otto Scharmer s’est inspiré de la célèbre formule d’Einstein : « Les problèmes ne sont pas résolus au niveau de conscience où ils ont été engendrés. » En d’autres mots, ne comptons pas sur notre passé pour réinventer l’avenir. Nous avons trop tendance à nous projeter selon notre connaissance, notre « vieux » système de pensée qui régit nos décisions et répètent nos erreurs. C. Otto Scharmer nomme cela, « l’angle mort », une part obscur que nous devons explorer pour initier un vrai changement.

Le changement se vit au présent

Prendre le temps, ralentir, aller dans le calme intérieur, permet d’élargir et d’enrichir nos perspectives pour faire émerger les meilleurs futurs possibles. Ce que nous sommes aujourd’hui nous apporte les meilleures enseignements. De cette idée est né le concept de presencing, la présence attentive ou consciente.

Une redéfinition du leadership

Face à la complexité du monde dans lequel nous vivons, la démarche s’appuie sur la force du collectif. C. Otto Scharmer écrit :

« L’écrivain devant la page blanche doit savoir laisser émerger les choses : les leaders doivent faire évoluer l’organisation de telle sorte que ses acteurs perçoivent et visualisent les futurs émergents (ou les potentialités émergentes NB) à la fois individuellement et collectivement. »

De facto, sa méthode est très efficace dans le cadre d’un groupe, puisqu’elle empêche une introspection personnelle néfaste.

La « théorie U » en 7 points

1.    Co-initier

Il s’agit d’identifier une équipe qui partage les mêmes envies d’avenir, c’est le noyau. Définir une « intention commune » afin de créer un désir d’appartenance fort. Dès lors, l’écoute et l’empathie sont les valeurs essentielles afin de s’accepter et d’accepter les autres.

2.    Co-observer

Toujours en faisant taire la voix du jugement, il s’agit d’écouter. N’intervenir que pour faire aller plus loin : mais encore ? C’est-à-dire ? Que veux-tu dire quand tu dis que ? L’expression profonde et authentique de chacun suppose une forte confiance à l’égard des membres du noyau et un respect inconditionnel des personnes.

3.    Co-sentir

Il s’agit ici de conjuguer – esprit, coeur, volonté – en un alignement indissociable au niveau individuel et collectif. Ce lâcher-prise fait sauter les verrous de la peur et permet l’émergence de nouvelles possibilités.

4.    Présence

Grâce au travail déjà réalisé, en se focalisant sur l’intention commune, on peut se délester de tout ce qui n’est pas essentiel. Le presencing est la force qui permet de décider aujourd’hui, avec plus de précision, ce que vous voulons « vraiment » demain.

5.    Cristalliser

Le franchissement de ce seuil par le noyau permet une réelle transformation et consolide le « nouveau monde » qui est construit.

6.    Prototyper

On incarne le projet en explorant le futur par l’action. Comme on le fait dans l’industrie, on prototype. On rejoint des réseaux, on apprend, on imagine, on concrétise.

7.    Performer

Il s’agit d’évaluer les résultats obtenus à la phase précédente pour retenir ce qui marche. Cette phase de déploiement à grande échelle quand elle est réussie doit générer : action, joie et performance.

Loin de se perdre dans le groupe, l’individu que nous sommes a une chance exceptionnelle de s’exprimer, et d’apporter ce qu’il a de meilleur avec la « théorie U ». Il existe d’autres méthodes comparables comme celles d’Hudson ou de Bateson, mais ici, ce qui est plus fort, c’est l’approche collective dès le début pour former un véritable noyau. S’orienter immédiatement vers l’avenir, dépasser sa part d’ombre et celle des autres, sont des applications concrètes rendant la méthode opérationnelle. Ainsi, en dépassant ses peurs, nous pouvons imaginer un monde meilleur. Ne parlons plus d’utopie mais de projet, changeons le rival en collaborateur et regardons l’autre comme une source riche d’enseignement. Voilà de quoi rendre nos journées plus belles !